Nous sommes allés à la rencontre de Yasmine, plus connue sous le pseudo de Ely Killeuse, une jeune femme de 30 ans, qui prône l’acceptation de son corps et le self-love. En mai dernier, elle a publié son tout premier livre Body Positive Attitude (Editions Marabout – mai 2018) où elle raconte comment elle en a fini avec la tyrannie du « corps parfait ».
Aujourd’hui, tu es une des figures de proue du body positive en France. Mais cela n’a pas toujours été le cas… Quel est ton parcours ?
Au départ, j’étais en surpoids. Puis lorsque j’ai rencontré mon mari, et je me suis mise à courir. J’ai perdu du poids très facilement puisqu’à cette époque je n’avais aucune activité sportive. Et quand j’ai commencé à perdre des kilos, j’ai eu envie d’en perdre encore plus… Je me suis inscrite sur les réseaux sociaux quand j’ai découvert qu’il existait une communauté autour du hashtag #régimeuse. Par la suite, je me suis dirigée vers les fitgirls. Je faisais ma petite photo le matin, je postais toujours plus de sport et je mangeais toujours moins…
Et pendant toute cette période, j’ai fait un peu le yoyo. J’ai atteint un 36, je suis rentrée dans mon jean « test ». Mais ce n’était jamais assez. A un moment donné, j’ai dit stop. J’ai découvert des comptes body positive. J’ai alors commencé à mettre des photos de moi dans des positions, pas forcément les plus flatteuses, mais des positions naturelles ! Petit à petit, je me suis renseignée sur ce mouvement et j’ai partagé de plus en plus autour de ce thème. D’une part parce que ça me faisait du bien mais aussi parce que ça faisait du bien aux autres.
Comment ta communauté a vécu ta nouvelle philosophie ? D’une fitgirl à une adepte du body positive…
Finalement, ça s’est fait très naturellement. J’ai tout de suite reçu énormément de messages de filles qui m’ont dit encouragé. J’ai senti rapidement qu’il y avait une attente, que je n’étais pas la seule à me demander pourquoi je n’avais pas de corps parfait avec des abdos apparents. A l’époque, je faisais du crossfit, je me levais à 6 heures tous les matins… J’ai réalisé que toutes les filles avec qui je m’entraînais étaient comme moi : elles avaient de la cellulite, du ventre, des seins qui tombent… Des sportives que l’on ne voyait pas du tout sur les réseaux sociaux finalement. Et je me suis tout de suite que c’était dommage.
Comment est-ce que tu définirais le body positive ?
Pour moi c’est un mouvement ouvert à tous : grand, mince, petit, noir, blanc, roux… On a tous une raison d’être complexé ! Pour moi le body positive ne catégorise aucun type de corps : ce mouvement inclut tout le monde ! Cela ne fait pas l’unanimité. Certaines personnes estiment que le body positive devrait s’adresser uniquement aux personnes en surpoids, moi, je ne le vois pas comme ça. Il n’y a pas de norme pour aimer son corps. Et les TCA le montrent très bien, il y a des personnes qui font du 34 et qui se font vomir, qui détestent leur corps. Le body positive c’est un mouvement qui doit être bienveillant pour soi mais aussi pour les autres.
Est-ce que l’on peut devenir body positive du jour au lendemain ? Comment accepter son corps tel qu’il est ?
C’est quelque chose qui prend du temps. J’ai commencé les régimes à l’âge de 12 ans… Donc j’ai cherché à changer mon corps très jeune ! J’ai passé 15 ans de ma vie à faire des régimes et à ne pas m’accepter. On ne balaye pas 15 ans de complexes en une fraction de seconde. Il m’a fallu un an et demi avant de m’accepter réellement. J’ai évolué grâce à des « tips » que j’ai appliqué [petites astuces NDLR]. Ce n’est pas quelque chose qui se fait du jour au lendemain… Même si, bien entendu, cela dépend des gens.
Quel regard portes-tu sur les fitgirls qui continuent d’exposer un corps parfait sur les réseaux sociaux ?
Je considère que le principal est que l’on soit heureux peu importe la façon dont on l’est. Je peux concevoir qu’il y ait des filles qui soient heureuses avec un corps musclé qui répond aux standards classiques de beauté. Je n’aime pas le principe de cracher sur une catégorie de personnes pour en valoriser une autre. Je continue de suivre quelques fitgirls parce que j’aime bien ce qu’elles partagent au-delà des photos qu’elles postent. Le principal est que chacun trouve ce qui lui plaît.
Si toutes les fitgirls acceptaient que les personnes « grande taille » s’assument telles qu’elles sont et vice versa : le monde tournerait plus rond. Il faut de la bienveillance des deux côtés. D’ailleurs, quand j’ai commencé à m’accepter et à porter un regard bienveillant sur moi, j’ai aussi posé un regard bienveillant sur les autres. Quand j’étais mal dans ma peau – quelque soit mon poids – j’étais beaucoup plus critique ! Aujourd’hui, je n’ai pas besoin de rabaisser quelqu’un pour me sentir mieux, je n’ai pas besoin de me comparer.
Est-ce que tu es toujours sportive ? Qu’est-ce qui a changé dans ta pratique du sport ?
J’ai une activité sportive PLAISIR. Avant, je courrais dans un objectif de performance, même quand je n’en avais pas envie. Aujourd’hui, j’écoute mon corps et je fais le sport qui me fait plaisir au moment où j’en ai envie. Je ne m’engage pas sur un abonnement pendant un an, je prends des abonnements plus courts.
J’ai par exemple fait de la musculation pendant huit mois, puis j’ai arrêté à cause de petits soucis de santé. A présent, j’ai envie de changer ma pratique sportive. Et je changerai à nouveau en fonction de ce que mon corps veut. Tout ce que je fais, je le fais uniquement par plaisir et pas dans un but de performance.
Dans un monde parfait, qui verrais-tu en Une des magazines ?
Tout le monde ! Il faudrait voir des gens peu importe leur couleur de peau, de cheveux, avec des handicaps ! On devrait tous pouvoir faire une Une de magazine. Moi par exemple, j’aimerais bien voir des nanas qui font un 42-44 en couverture. Des filles trop grosses pour être considérées comme des mannequins mais aussi trop minces pour être classées dans la catégorie « modèles grande taille. » Il faudrait que l’on voit plus de gens comme nous ! Et surtout, pas de retouche.
Quels conseils donner aux lecteurs de So Healthy qui ont du mal à s’accepter ?
Le premier conseil que je donne est de se regarder dans le miroir en s’imaginant que l’on regarde sa sœur, sa maman, sa meilleure amie. Est-ce que l’on irait leur dire qu’elles sont dégueulasses ? Qu’elles sont grasses ? Qu’elles n’ont pas de nichons ? Non ! On essaiera plutôt de la valoriser en parlant de ses jolis cheveux, de sa peau lumineuse… Ce que l’on dit à quelqu’un que l’on aime, c’est ce que l’on doit se dire à soi-même.
Tu as été publié en mai dernier… Quels sont tes projets ? Un autre livre ?
Je me laisse porter par ce qui vient. Je continue de travailler dans une banque. Je veux continuer à prendre du plaisir et à être libre tout simplement !
La rédaction remercie Ely Killeuse d’avoir répondu à nos questions. Vous pouvez découvrir ses conseils 100% self-love sur son blog et la suivre sur Instagram (@Ely_Killeuse).